Et comment ?
J’avais esquissé tantôt l’apprentissage du japonais en France. Retour sur le sujet pour un petit complément.
Toi qui me lis, si tu envisages de partir au japon pour une semaine ou deux, apprendre le japonais ne te serviras pas à grand-chose. Contente-toi des formules standard – bonjour, merci, au revoir. Si tu veux prévoir large, apprends quelques phrases bonus pour les cas d’urgence, de préférence sur papier.
Quand mes parents viennent nous rendre visite, comme on les laisse parfois baguenauder tout seuls dans Kyōto, je vérifie toujours qu’ils partent avec la “fiche SOS”. A savoir un papelard sur lequel sont notées quelques phrases clés en français, anglais et japonais. S’ils sont incapables de déchiffrer cette dernière ligne, ils peuvent la faire lire au premier quidam venu qui leur indiquera le métro, hôpital, poste de police le plus proche. Et croyez-moi, aller chercher ses parents chez les flics comme deux gosses paumés dans un supermarché, ça n’a pas de prix !
Si tu comptes t’expatrier pour plusieurs mois ou années, tu vas très vite te rendre compte que la question du pourquoi ne se pose même pas. C’est un handicap de fou furieux que de vivre dans un pays dont on ne parle pas la langue. Sauf à bosser dans une entreprise étrangère où on ne baragouine que ta langue. Et encore, à moins d’y vivre H24, tu seras forcément confronté au monde du dehors avec de la VO à perte de vue.
N’importe quel expat’ te le dira, la chose est récurrente chez tous les bloggers et c’est bien le seul point sur lesquel on soit tous d’accord : ne pas parler japonais est très handicapant. Surtout si tu veux trouver du taf, ouvrir un compte en banque, régler tes démarches administratives, sociabiliser avec les indigènes, et pourquoi pas te trouver une copine parce que 6 mois à se tirer sur la nouille c’est long.
Je mets de côté ceux qui choisissent les solutions de facilité comme rester enfermé chez soi ou ne fréquenter que des Français ou à défaut d’autres étrangers sur la base commune de l’anglais. Idem les connards finis à la pisse qui partent la fleur au fusil, se plaignent de ne rien comprendre une fois sur place… et ne font rien pour y remédier. Reste deux cas : les départs sur un coup de tête ou dans l’urgence, et les adeptes du challenge et de la survie en terre inconnue.
Or donc, Survivor, comment vas-tu faire ?
Tu peux apprendre sur le tas. C’est pénible, très long surtout… et tu sauras te débrouiller pour mener une conversation quand il sera l’heure de rentrer dans ton pays natal.
Si tu as opté pour une guest house en guise d’hébergement, tu peux toujours tenter le coup auprès de tes collègues de chambrée. Beaucoup de ces établissements accueillent aussi bien des étrangers que des Japonais, principalement étudiants. Il y a donc moyen de se trouver des cours particuliers à domicile, et même gratos si tu peux enseigner en échange une langue que tu maîtrises. Là, il va de soi que l’anglais reste la meilleure niche par rapport à l’albanais.
Enfin, l’école de langue. On en trouve à tous les prix avec toutes les formules possibles en terme de volume, fréquence, horaires… Ici, il n’y a pas vraiment de “bon” choix, pas de solution parfaite et idéale, plutôt la bonne école qui va te correspondre à toi. Trois facteurs entrent en ligne de compte : le temps, les attentes, les facultés. Il va de soi que plus le séjour sera court, plus il sera nécessaire de se tourner soit vers les méthodes light qui n’abordent que les bases, soit vers les méthodes ultra intensives pour apprendre un maximum de choses en un minimum de temps. En termes d’attente, là c’est toi qui vois en fonction de ce que tu veux. S’il n’est question que de se débrouiller, l’oral suffira, pas la peine de s’encombrer de la maîtrise des kanji. La meilleure solution reste une école de conversation. Le genre de programme prévu avec des petits groupes (5-6 personnes), relativement peu de leçons (une quinzaine) et des cours brefs et dynamiques. A l’inverse, si tu veux maîtriser toute la langue, prévois du temps, de l’énergie, de la patience et de l’argent. Après, faut être réaliste, on n’est pas tous égaux devant l’apprentissage. Certains peuvent supporter 4 heures de grammaire rébarbative, d’autres non. Certains peuvent ingurgiter des carnets de vocabulaire entiers, d’autres en auront oublié les trois quarts la semaine d’après. Les aptitudes d’apprentissage et la perméabilité à l’enseignement guideront le choix vers une école type classique (classe de 15-20, 4h de cours magistral) ou vers une structure plus “fun”.
Je suis plutôt adepte du bon gros cours traditionnel bien chiant. Ça n’engage que moi. Pour avoir testé un temps la méthode style école de conversation… ben j’étais largué alors que censé être plus simple (ce qui ne veut pas dire plus facile). Sauf que voilà, ce n’était pas le type d’enseignement qui me convenait parce que trop délétère. Et à l’arrivée, le résultat est pire que mieux. On n’avance pas, c’est décourageant et à l’arrivée faut quasiment tout reprendre de zéro ailleurs. Finalement, je m’en suis mieux sorti à me taper du 8h par jour à m’enfiler des exos de grammaire en série, des listes de vocabulaire bien longues bien lourdes. Mon pote Pierrot qui vit à Nara, c’est tout l’inverse. Au bout de 20 minutes le cul vissé sur une chaise à écouter blablater un gus sur les propositions subordonnées, il a envie de s’enfuir en hurlant. Comme il le dit si joliment “la grammaire m’emmerde et c’est réciproque”. Chacun avec des parcours diamétralement opposés (et très hétéroclites), des méthodes à mille années-lumière, on arrive au même résultat : on parle et lit couramment le japonais l’un comme l’autre.