Les feuilles se ramassent à la pelle et les pelles se ramassent à la langue : c’est l’automne.
Le Japon a beau être la terre de toutes les bizarreries pour l’observateur non averti, il n’échappe pas à la règle. Ici aussi l’automne existe et il tombe le même jour que partout ailleurs.
Une particularité tout de même, le jour de l’équinoxe est férié. Depuis 1948, Shūbun no Hi (秋分の日) est un événement laïque, tout comme son équivalent printanier le Shunbun no Hi (春分の日).
Les deux fêtes d’équinoxe ne sont pas pour autant sorties d’un chapeau magique, elles existaient déjà en tant que fêtes nationales depuis 1878 sous l’appellation de Shunki Kōreisai (春季皇霊祭) et Shūki Kōreisai (秋季皇霊祭), leur origine remontant encore bien plus haut dans le temps. Au cours de ces journées, on honorait la mémoire des anciens empereurs et des membres décédés de la famille impériale. Au printemps, on priait également en vue d’obtenir de bonnes récoltes ; à l’automne, on remerciait les dieux desdites récoltes.
La Constitution de 1947 niant le statut divin de l’Empereur, les fêtes ont été modifiées en conséquence pour séparer Etat et religion… même si en pratique beaucoup de Japonais ont continué sur la même lancée (pays de traditions oblige).
Aujourd’hui, l’équinoxe d’automne est un jour de commémoration des défunts à l’image d’un 2 novembre dans la tradition catholique. Comparaison on ne peut plus judicieuse (bravo, moi) avec cette France si laïque que la moitié des jours fériés y sont liés à des fêtes religieuses. Comme quoi, décidément, les Japonais diffèrent peu des Français sur bien des plans.
L’équinoxe de printemps, lui, est dédié à la nature et aux êtres vivants… mais les Japonais en profitent aussi pour aller honorer les défunts sur leur tombe.
Dans les deux cas, on passe au temple et on va au cimetière nettoyer les tombes et les couvrir d’offrandes.
A noter une particularité du Shūbun no Hi qui, lorsqu’il tombe en concurrence avec le Keirō no Hi (3e lundi de septembre férié ; cf. là) et avec un week-end, donne lieu à un bricolage de calendrier pour respecter le nombre annuel de jours fériés. On peut alors se retrouver avec un pont d’une belle longueur, appelé “deuxième Golden Week” (第2のゴールデンウィーク) ou “Semaine d’Argent” (シルバーウィーク) en référence à la blanche chevelure des anciens.