Préparatifs, déballage, achats

Grand nostalgique dans l’âme – je ne suis toujours pas guéri des Albator et Goldorak, pardon, Herlock et Mazinger de mon enfance –, je repense la larme à l’œil à cette période si proche et si lointaine où Yumi et moi préparions notre départ (enfin, mon départ et son retour).

Quelle frénésie…
Par chance, les dieux de l’organisation étaient de notre côté. Primo, au plan du train et de l’intendance, je suis carré comme un général prussien. Secundo, Yumi, pour avoir fait le même chemin et les mêmes démarches en sens inverse il y a quelques années, avait l’expérience de la chose. Tertio, la présence sur place de la “gens yumika” (sa famille donc – c’est du latin, ça ne veut rien dire, mais je trouve que ça sonne bien) nous a considérablement facilité la vie tant pour les démarches administratives que pratiques. Le fait est qu’on atteint vite la limite autorisée en avion (20 kg en soute et 12 en cabine, si je me souviens bien) et qu’il a fallu téléporter beaucoup d’affaires à travers le monde. Quand on a envoyé le contenu de nos apparts respectifs au bout du monde, on était donc bien contents de savoir qu’il y avait quelqu’un de confiance à l’arrivée pour réceptionner nos affaires.
Forcément, il a fallu en laisser derrière. J’ai dû abandonner mes meubles, l’électroménager lourd et quelques affaires à mes parents, ce qui m’a laissé l’impression bizarre qu’ils touchaient un héritage de leur fils. Heureusement, j’ai des goûts simples (si on met de côté les deux ordis, la chaîne hifi, la télé, le lecteur DVD, etc.). En tout cas, je les ai compacts : hors une poignée de fringues et mon matériel informatique, l’essentiel de mes possessions se résume à “quelques” bouquins (1536 précisément). Ma bibliothèque tient dans un mouchoir de poche, ou en tout cas un conteneur de taille raisonnable (le poids de l’ensemble l’est nettement moins lui).
Yumi, en revanche, ça n’a pas été la même chanson. Ben ouaip, c’est une fille… Imaginez une cantine militaire de 120x60x50 cm ; ensuite vous la multipliez par… beaucoup… j’ai perdu le compte à force de les voir défiler à en choper le tournis. L’étiquetage, par contre, c’était simple : fringues, chaussures, fringues, chaussures, fringues, chaussures… 30 paires de bottes ! autant de chaussures allant des pantoufles aux escarpins de soirées ! assez de vêtements pour équiper la Grande Armée et la faire crever de chaud malgré l’hiver russe !

Yumi, ma Cendrillon à moi.
Yumi, ma Cendrillon à moi.

Bref, entre le poids de mes bouquins et l’envergure de sa garde-robe, je dirais que nous avons été conformes à ce qu’on attend de nos sexes respectifs, partant du principe que les femmes sont envahissantes et que les mecs sont cultivés des gros lourds.
Les parents de Yumi ont été bien gentils et ont eu bien du courage de se charger de la réception à la manière nippone, alliant rigueur, discipline et sens du service. どうもありがとうございます。

Il ne manquait au déballage de tout cet attirail que la musique de Benny Hill… ce qui n’a duré que le temps que je remette la main sur le morceau et que je le passe à fond la caisse. Au rythme d’une marche forcée napoléonienne, on a eu assez vite fait d’emménager en vertu du principe “plus vite on torche ça, plus vite on peut glander” (et accessoirement régler quelques urgences administratives).
Il va de soi que notre nouveau chez nous fut promptement “étrenné” et qu’à défaut de champagne, on l’a baptisé avec ce qu’on avait sous la main (“entre les jambes” correspondrait mieux à la réalité anatomique).

Nos premiers achats ont surtout été d’ordre pratique, voire vital. Ce qui, me connaissant, a commencé par l’achat de 3 kg de café. Quelques exemples :

– Direction la banque pour transférer ma “fortune” qui ne représentera qu’une micro goutte dans la fuite des capitaux français vers l’étranger. Me reste en souvenir quelques francs et euros, possible support pédagogique soit pour un cours de civilisation, soit pour un cours sur les expressions typiquement françaises (“ça s’appelle revient”).

“Touche pas au grisbi, salope !” (Les Tontons Fingueurs)

 – Se fournir en jus, outre le café, passe aussi par les adaptateurs (fiches plates pour 110 V vs fiches rondes 220 V). Ça peut sembler un détail… jusqu’au moment où vos appareils commencent à biper dans tous les sens pour annoncer le black out imminent.

Ne rien voir, ne rien dire, ne rien entendre.

 – Une question, insolite mais intéressante, m’avait été posée : as-tu trouvé un lit à ta taille ou c’est à l’ancienne sur un futon ? Réponse, les deux. Le fait est que trouver un pieu XXL a été une de mes premières préoccupations. Pas tant pour dormir – éternel insomniaque, mon rythme est tombé de 4-5 h à 2-3 h de sommeil par nuit depuis mon arrivée – que pour trouver un terrain de jeu à la mesure de nos activités plumardières frénétiques avec Yumi – ma libido ayant à l’inverse décuplé.
Ici, attention au scoop, c’est le pays des futons. Un pieu coûte donc nettement moins cher qu’en France, puisqu’on économise les taxes vampiriques à l’importation et le surplus “exotique” (donc de luxe, donc cher).
Les parents de Yumi avaient fait transvaser un futon de dépannage de leur chambre d’amis vers notre appart. C’était sympa pour pouvoir pioncer ailleurs que par terre après 12 h d’avion. Par contre, plumard de nain, j’avais les pieds qui dépassaient largement !
Tous les Japonais n’ayant pas nécessairement une taille de gnome, les paddocks format basketteur existent chez les équivalents locaux de Conforama. La différence notable avec la France, c’est au niveau de la livraison qui a lieu au jour dit et à l’heure dite. “On vous l’apporte mardi à 14 h” veut dire “on vous l’apporte mardi à 14 h”, pas “en gros on passe mardi dans la journée, au pire mercredi”. A 14 h pétantes, on sonne. Le temps d’installer le bazar et à 14 h 15, on peut faire sa sieste ou étrenner le pieu. La qualité de service est vraiment une religion… au point qu’on prie pour que les livreurs n’arrivent pas à 14h01, sans quoi ils reperdent 5-10 mn à se confondre en excuses.